Après l’excellent 1963 Grande Champagne, on change de cru et nous partons pour les Borderies, un petit territoire à ne pas sous-estimé. L’embouteillage n’ayant pas été réalisé, le degré n’est exceptionnellement pas précisé…
Nez : on sent qu’il ne va pas se livrer immédiatement. On perçoit les balbutiements uniquement : de la mangue poêlée, de l’eau de coco, une touche de litchi et d’ananas… Mais les fruits exotiques ne sont pas les héros de ce nez. En effet, la fraîcheur vient se déposer avec une note de terre métallique (type argile), de l’humus, des herbes fraîches nous amenant dans le sous-bois humide (fougère, légère apparition mycélienne) alors que le muguet et le bois noble s’immiscent dans le paysage. La minéralité se présente également à son avantage tandis qu’un climat humide et frais semble nimber l’espace. L’ouverture nous propose des touches subtiles : miel, amandes (colle), levure, noisettes concassées et bois. La passion passe alors à l’attaque (toujours avec subtilité), suivie par la menthe, le beurre et les agrumes (kumquat, citron, zeste de combava). Il s’enrichit avec le temps d’une légère sensation cotonneuse agrémentée d’une connotation céréalière (blé, lin). Ne vous attendez pas à un nez clé en main, il faut focaliser son attention sur lui afin d’en extraire les composantes les plus fines. L’ajout d’eau fait reculer le fruité (qui devient séché : mangue, papaye) et met sur un piedéstal les notes beurrées et fraîches, tout en douceur avec des agrumes.
Bouche : c’est puissant, vif et construit de manière fallacieuse. En effet, les éléments semblent séquencés mais, en réalité, ils se mêlent de manière ondulatoire. Le départ nous ramène dans le sous-bois avec son lot de fougère et de pierre humide. La menthe embraie avec du bois présent mais très bien intégré (tek, pin, bois sec) avant de retrouver le basilic, les agrumes sous voile de caramel et noisette (kumquat, zeste de citron, mandarine satsuma) et les fruits exotiques tendance passion plutôt que mangue et ananas… Il y a des moments plus miellés, plus acidulés voire plus épicés (bois d’inde, girofle) ou boisés. Une bouche qui, à l’instar du nez, n’est pas facile et nécessite d’être au calme pour en profiter à son faîte. La dilution lui donne plus d’allant avec une passion ragaillardie qui est alliée à de la réglisse, à du cumin et à du poivre de Sichuan. Le boisé est plus en retrait tandis que la végétation est plus franche, ciselant des herbes fraîches tout en conservant les notes de menthe .C’est rond mais pas doucereux, végétal et boisé mais pas amer ou astringent. Il y a beaucoup de justesse et de relief bien qu’il ne s’agisse probablement pas d’un cognac pour néophyte.
Finale : en l’état elle est longue et bien persistante. Parfaitement alignée avec la bouche, elle met en avant le bois et les agrumes frais, le sous-bois et la passion, bien nette. L’arrière-bouche, plus minérale, argileuse et épicée apporte des contre-points nécessaires à l’avènement de sa structure. Il conserve donc une fraîcheur étonnante malgré son apport boisé et appose un film lingual (sans outrance) lors de la fin de dégustation.
Music Pairing : Nina Simone – Feeling Good
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