L’arrivée d’un whisky japonais est toujours un événement même si l’on sait que l’on ne pourra pas forcément y participer. Prévu pour le 1er février, le retour en fanfare du Sherry Cask de Yamazaki est forcément attendu. D’une part du fait de la nébuleuse actuelle du whisky japonais et de sa baisse de volume disponible, de l’autre par l’engouement pour cette édition qui remonte au séisme Murray de 2015. A 290€, on y réfléchira peut-être à deux fois…
Le Japon s’éloigne
Plus le temps passe et plus le whisky japonais de qualité semble être un lointain souvenir pour les amalteurs que nous sommes. Cela provient tout simplement du fait que le tri par le portefeuille est bien établi…
Les versions âgées ont connu un bond tarifaire absolument ahurissant. Pour rester sur les terres de Yamazaki, le 18 ans est l’exemple le plus probant puisque il y a de cela quelques années seulement, il se trouvait au tiers du prix couramment pratiqué lors de l’année écoulée. De la même manière, il semble de plus en plus compliqué pour nos chers cavistes de demander un produit made in Japan sans qu’ils aient une réponse impliquant une livraison contingentée.
Certes, on peut être compréhensif et admettre que les stocks ne sont pas au plus haut du fait de la demande. Mais au final, on connaît surtout une perte de contact avec la réalité de plus en plus évidente. De par son image soignée, l’industrie héritière de Taketsuru surfe sur son succès, mais toute sa production est en passe d’être cataloguée comme rareté.
Si on excepte les distilleries fermées phares (Karuizawa et Hanyu) qui voient leurs stocks se terminer, Chichibu joue le whisky de niche et les grandes classiques (Yamazaki, Yoichi, Miyagikyo, Hakushu) n’ont plus suffisamment d’avance pour maintenir leur rayonnement quantitatif international.
Dans ce schéma très restrictif, la gamme classique est devenue, de fait, une brochette limitée. On attend avec impatience le moment où les premiers batches des Yamazaki Distiller’s Reserve seront considérés comme des must aux enchères ! Il faut dire que si les propriétaires de Karuizawa ont réussi à le faire avec l’Asama, le rêve est permis…
[quote_center author= » »]L’engouement démesuré et aveugle pour tout ce qui touche à la production japonaise a complètement dérégulé le rapport qualité-prix de leurs bouteilles[/quote_center]
Bien entendu, tout cela ne veut pas dire que le savoir-faire n’est plus là, que l’intérêt gustatif a disparu. Toutefois, l’engouement démesuré et aveugle pour tout ce qui touche à la production japonaise a complètement dérégulé le rapport qualité-prix de leurs bouteilles tout comme la place des éditions limitées. En effet, dans ce contexte délicat, ce Sherry Cask 2016 n’est plus une alternative à une gamme qualitative, et plus particulièrement au 18 ans. C’est devenu un objet de convoitise de manière presque mécanique, sans qu’il existe un lien avec le reste des Yamazaki disponibles, si ce n’est la difficulté de s’en procurer.
Le sherry cask s’envole
Il faut dire que le livre du prêcheur au chapeau (de 2015) a bien aidé dans ce cas précis. En effet, alors que le succès était déjà au rendez-vous, la consécration de l’édition 2013 en tant que « Meilleur Whisky du Monde » avait généré une embardée sur les stocks, que ce soit en première main ou aux enchères. En toute logique, le prix de sortie de ce nouvel objet maltesque sera de 290€, soit deux fois et demie celui de l’édition 2013.
Mais revenons donc à notre précieux liquide. Comme son nom l’indique il s’agit d’une sélection précise de fûts de sherry (oloroso en l’occurrence) qui par vatting vont permettre de réaliser un whisky sans âge. Le processus de sélection des fûts semble être contrôlé de près par le maître blender de Yamazaki, Shinji Fukuyo. Il supervise toute la chaîne, commençant dans les bodegas espagnoles où les sherrys sont produits : le chêne utilisé, la sélection des fûts, le charring (c’est à dire le brûlage de l’intérieur des fûts) et la maturation évidemment. Au bout de 3 ans, les fûts sont envoyés à Yamazaki, prêts à être utilisés.
Ce cru 2016 n’a pas de raison d’être mauvais, il faut bien l’avouer. Il reprend en effet une partie des fûts qui composaient l’édition 2013, mais qui ont subi un vieillissement prolongé. Pour compléter son assemblage, titrant à 48%, Shinji Fukuyo a notamment ajouté des whiskys âgés de plus de 25 ans. Nous ne connaissons bien évidemment pas les proportions de chaque fût et l’on ne peut donc pas décemment par tirer de conclusion quant à l’impact de ces petites nouveautés…
Quoi qu’il en soit, la science de l’assemblage n’est plus à prouver dans les grandes distilleries japonaises et l’on devrait encore une fois avoir un joli spiritueux. Toutefois il semble, sur le papier, déjà trop cher.
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