La définition du Tennessee whiskey continue de faire couler beaucoup d’encre. Jack Daniels instigateur de la loi régulatrice se voit opposé à Diageo. Le groupe britannique veut, quant à lui, assouplir la récente décision (2013) donnant le cadre législatif du Tennesse whiskey. Une décision en janvier devrait stopper les indignations publiques dont font preuves les deux clans…
C’est une mèche qui n’arrête pas de se consumer. La bataille du Tennessee Whiskey fait rage et ce sont deux groupes phares qui guerroient afin de tirer avantage de la situation.
Définition et début de polémique
Mais revenons un peu en arrière. Brown-Forman qui détient l’emblématique Jack Daniels a mené l’année dernière une campagne afin que le « Tennessee Whiskey » soit reconnu comme une désignation américaine à part entière.
Leur combat a abouti puisqu’en mai 2013, l’Assemblée Générale du Tennessee a protégé l’appellation. Ainsi, elle correspond à une composition en céréales fermentées indiquant au moins 51% de maïs. Elle doit aussi impliquer du charcoal mellowing ou le Lincoln Country Process qui depuis 1825, définit le passage dans un filtre composé de charbon de bois d’érable avant le vieillissement. En outre, le vieillissement doit avoir lieu dans des fûts en chêne neufs, carbonisés, vieillissant dans l’état du Tennessee.
C’est là que Diageo, propriétaire entre autres de George Dickel, est entré en scène arguant que la réutilisation de bourbon barrel permettrait de grandes économies, pas uniquement pour eux mais également pour les distilleries artisanales.
Il est toujours amusant de voir le géant se placer du côté des petits producteurs, aussi étonnant que si Kim Jong-Un vantait les mérites du capitalisme mondialisé.
Bien entendu, ceci n’est ni un argument pour ni un argument contre la proposition de la multinationale britannique.
Celle-ci a d’ailleurs offert son opinion aux autorités compétentes.
Un comité devait étudier durant l’été 2014 cette proposition plutôt que l’adopter directement dès mars 2014.
Guerre de citations sur le fond : Jack Daniels, Diageo & les républicains
C’est alors que tout le monde a commencé à monter aux créneaux. Jeff Arnett, le maître distillateur de Jack Daniels, a donné sa vision de cette contre-proposition de Diageo, dès mars, en affirmant qu’elle sapait le processus qu’ils essayaient de protéger depuis presque 150 ans.
Il a également pointé Diageo du doigt, responsable d’une véritable attaque selon lui : « Ce n’est pas à propos des intérêts des micro-distillateurs de notre Etat. Nous supportons les micro-distillateurs. C’est à propos de Diageo, une énorme compagnie étrangère avec plus d’intérêts pour le bourbon et le scotch, essayant d’affaiblir ce qu’est le Tennessee Whiskey et nous ne devrions simplement pas autoriser cela. »
Arnett précisait également l’absence d’obligation qui découlait de cette décision : » Personne ne dit que les entreprises ne peuvent produire de la façon dont elle le désire – que ce soit sans charcoal mellowing ou en utilisant des fûts usagés. Ils ne devraient simplement pas l’étiqueter sous le nom Tennessee Whiskey. »
Bien entendu Diageo n’en est pas resté là. Guy L Smith IV, le vice-président exécutif de Diageo, a répondu rapidement : » Ce n’est pas à propos de Diageo, puisque tous nos Tennessee Whiskeys sont faits avec du chêne neuf. C’est à propos de Brown-Forman qui essaie d’étouffer la compétition et l’esprit entrepreneurial des micro-distilleries. Nous ne sommes pas sûr de savoir de quoi ils ont peur, puisque nous trouvons que de nouveaux produits innovants provenant d’une nouvelle génération de distillateurs est sain pour l’industrie toute entière« .
Enfin, les républicains, à travers la voix de leur représentant Bill Sanderson ont reconnu que la nécessité d’utiliser des fûts neufs pouvaient être problématiques pour les petits producteurs : « Nous allons toujours définir le Tennessee Whiskey, mais pas aussi strictement que Jack Daniels voudrait que nous le fassions ».
Bill Sanderson a ajouté que le fait que Jack Daniels produise ses propres fûts lui offrait déjà un avantage compétitif.
Guerre de citations sur l’étude de la proposition : 2 angles de vue, 1 réponse pour janvier
De son côté Diageo s’est félicité de l’étude de leur proposition : « La législature du Tennessee a fait ce qu’il fallait et maintenant, plutôt que d’avoir une entreprise qui impose à tous, nous pouvons agir correctement et participer ensemble à une discussion ouverte concernant la création des meilleurs standards pour le Tennessee whiskey. C’est un bon jour pour le Tennessee, pour des petits et grands distillateurs, et pour les consommateurs du Tennessey whiskey« .
De son côté Brown-Forman a coupé court à la controverse via son vice-président directeur Jim O’Malley : « Essentiellement, cela arrête le débat sur ce qu’est un bon whiskey et nous ramène à en produire« .
Les législateurs doivent rendre leur verdict en janvier pour trancher sur ce sujet. Les deux camps doivent d’ores et déjà être suspendus à leurs lèvres.
En attendant Jeff Arnett a exprimé à nouveau ses inquiétudes : » Nous savons pertinemment depuis 150 ans que c’est ainsi qu’est le Tennessee whiskey. C’est simplement car nous avons beaucoup de nouvelles distilleries qui arrivent que nous sentons qu’il y a besoin d’avoir quelques règles du jeu […] juste pour que tout le monde demeure honnête« .
La véhémence entre Diageo et Brown-Forman devrait encore durer quelques temps avant que la loi n’édicte les nouvelles règles.
Alors conservation de monopole ou intrusion à but affaiblissant ?
On sent bien les intérêts qui déchirent tout consensus, faussant un peu les conclusions que l’on pourrait produire à propos de ce débat.
Dans tous les cas, on peut se féliciter qu’un peu d’ordre voit le jour dans la législation un peu foutraque des whisk(e)ys aux Etats-Unis.
Les premiers enseignements viendront probablement des premières productions suivant le changement ou le maintien de la législation.
Leave a Reply