On poursuit notre série de duels avec deux Caol Ila des années 90 qui ont baigné dans les eaux du sherry. Plutôt jeunes, ils étaient généralement considérés comme des réussites. C’était donc un bon argument (alibi, si vous voulez) pour voir ce qu’ils avaient dans le ventre.
Dans les deux cas il s’agit de fûts uniques, leur degré d’alcool est similaire, leur maturation a eu lieu à la même époque et, en sus, elle est de la même typologie (sherry). On est donc, sur le papier, face à des drams qui devraient avoir pas mal de points communs…
Le nez
Commençons par les fondamentaux. Pour ce qui est de la tourbe, on est pour ces deux drams sur une présence nette mais qui n’écrase pas le reste des arômes, avec une part iodée et marine. Pourtant on a déjà des dissemblances. Le Feis Ile (FI) n’a quasiment pas de fumée et ce sont les algues et les coquillages qui se montrent dominateurs. Par contraste, le Manager’s Choice (MC) est plus complet et évolutif. On part des embruns et de la fumée pour aller à la fois sur le carné et le médicinal en passant par le chimique.
De la même manière le sherry n’essaie pas de passer en force, ce qui est plutôt une bonne chose.
On va donc trouver une strate tourbée, une strate de notes plus typiques du distillat (ananas pour le MC ou marshmallows, banane et fruits blancs pour le FI) et une strate sherry qui se révèle vraiment à la dilution dans le cas du FI.
De manière générale le FI est bien moins complexe, bien moins précis et fait beaucoup plus jeune (surtout quand il n’a pas été dilué) et sec. De même, les notes de « chien mouillé » perçues sur le FI le rabaissent encore au niveau de ce comparatif. Mais il faut avouer que le Manager’s Choice est vraiment dans la cour des grands.
Le miel, l’orange, les fruits secs et des notes fraîches sont présents dans les deux cas. Mais, comme pour deux acteurs jouant le même texte, c’est l’interprétation, la faculté d’appropriation qui séduit le public.
Les notes d’oranges fraîche, d’ananas rôti, d’origan ou encore de côte de porc sont quelques uns des moments de justesse qui sacrent le MC en tant que meilleur nez (et de loin).
GROS AVANTAGE MC
La bouche
On retrouve globalement les mêmes divergences au niveau de la tourbe avec un FI moins complet mais l’écart se fait moins ressentir du fait des regains de sucrosité qui rendent ces deux malts assez rapidement accessibles.
Les stratégies sont différentes. Pour le MC, l’orange est la star incontestée et tout est fait pour la sublimer tandis que pour le FI elle n’est qu’un maillon de la chaîne.
Pour le MC et le FI, on a bien des épices, du caramel et des notes fraîches. Toutefois, le FI est plus sec et plus attendu. Certes, la guimauve et la pointe fleurie donnent une variation. De plus, la dilution lui est profitable, l’emmène encore plus dans sa zone de confort mais avec plus d’efficacité. Le MC, lui, n’écrase pas la concurrence par une variété monstre mais l’alcool est bien mieux intégré, la construction plus fine et les variations sont surtout très judicieuses.
A ce niveau-là encore, il n’y a pas de véritable lutte, l’écart étant assez évident.
GROS AVANTAGE MC
La finale
Sûrement l’étape de la dégustation où les différences sont les plus tenues. Le FI et le MC sont longs et persistants, avec une fumée plus « Caol Ilesque », tout en restant à la fois sur l’orange et la fraîcheur.
On préférera encore le MC de par sa précision et le charme de ses arômes alors que le FI, plus sec, donne une fin de dégustation plaisante mais qui n’excelle pas.
AVANTAGE MC
Conclusion
Nul besoin de dire que la version Manager’s Choice s’impose avec une aisance confondante. Elle ne boxe tout simplement pas dans la même catégorie que la version pour le Feis Ile. Elle fait partie du monde confortable des tueries, chose assez rare pour un malt aussi jeune. Sa maturité détone et nous offre une palette très variée autour de l’agrume, bien loin de l’image rustre de certains peaty-sherry. Le FI n’est pas mauvais en soi mais il possède quelques défauts et notamment des approximations aromatiques.
L’intérêt est, au final, d’observer que les caractéristiques « sur papier » d’une bouteille s’évanouissent assez rapidement et nous conforte dans l’idée que le fait de goûter est un impératif absolu.
Les notes de dégustation complètes se trouvent ici :
Caol Ila Manager’s Choice 1997/2009 11yo 58% Cask 14185 OB
Caol Ila 1996/2009 12yo 58% Cask 19313 OB for Feis Ile 2009
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